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Le « shark » en finance, figure pathologique mais valorisée du système capitaliste

Personnage ambivalent, presque emblématique du monde de la finance, le « requin » dans sa version française, symbolise la réussite, mais aussi une forme d’immoralité.

Le terme « shark » en finance évoque des images d’opportunistes sans scrupules qui parcourent les eaux du capitalisme à la recherche de proies vulnérables. Ces figures, souvent dépeintes dans les médias populaires, représentent une dimension controversée mais fascinante du système financier moderne. Comment ces « requins » parviennent-ils à s’ancrer si profondément dans un contexte économique valorisant tout en affichant des comportements souvent critiqués ? Cet article se propose d’explorer cette question à travers un prisme analytique et informatif.

L’ascension du « shark » financier

Les « sharks » financiers, souvent assimilés à des traders agressifs, des gestionnaires de fonds prédateurs, ou des spéculateurs sans état d’âme, ont émergé en tant que figures proéminentes parallèlement aux évolutions du capitalisme mondial. Encouragés par la dérégulation financière des années 1980 et les innovations technologiques facilitant le trading à haute fréquence, ces acteurs ont profité de la volatilité des marchés pour engranger des profits significatifs.

De nombreux observateurs situent l’avènement de ces figures dans le contexte historique du « Big Bang » de la Bourse de Londres en 1986, qui a vu la libéralisation massive des marchés financiers, selon Sarah Hall, professeure en économie urbaine à l’Université de Manchester (Hall, 2017).

Des comportements pathologiques ?

Les critiques adressées aux « sharks » mettent souvent en avant des comportements jugés pathologiques : manipulation de marché, prise de risques démesurés, et un manque d’éthique flagrant. Le scandale des subprimes de 2008 en est l’illustration probante ; des pratiques spéculatives effrénées et un appétit insatiable pour le profit ont entraîné une crise économique mondiale.

Néanmoins, certains chercheurs avancent que ces comportements ne sont pas nécessairement pathologiques mais plutôt rationnels dans un système qui les valorise. Un rapport de l’Université de Yale (2015) souligne que le comportement de ces « sharks » est souvent le résultat d’incitations intégrées dans le système financier lui-même, plutôt qu’une simple déviation morale.

Pourquoi le système capitaliste valorise-t-il ces figures ?

Le capitalisme moderne repose sur la recherche de l’efficacité, de l’innovation et du rendement maximal. Dans ce contexte, les « sharks » sont souvent perçus comme des catalyseurs de dynamisme économique. Leur capacité à détecter et utiliser les inefficacités du marché contribue, en théorie, à une meilleure allocation des ressources.

Un article du Financial Times (2021) argue que le rôle des « sharks » peut être perçu comme essentiel dans la prise de risque nécessaire à l’innovation financière. Les marchés, en récompensant ces prises de risque, créent un environnement où l’ambition et l’audace financière sont des valeurs centrales.

La fascination du public

La fascination que le public semble entretenir pour ces figures est également notable. Des films tels que Le Loup de Wall Street ou des séries comme Billions présentent ces personnages de manière charismatique, voire héroïque, contribuant à construire un imaginaire collectif qui oscille entre admiration et répulsion. Cette narration contribue à pérenniser leur place dans l’esprit populaire et économique.

Alors que le monde continue de naviguer dans les eaux tumultueuses du capitalisme mondial, le rôle des « sharks » financiers reste un sujet de débat constant. Bien qu’ils soient souvent critiqués pour leurs pratiques jugées immorales ou démesurées, ils incarnent une facette incontournable du système capitaliste contemporain. Loin de se limiter à un simple rôle antagoniste, leur existence soulève des questions fondamentales sur les valeurs et les dynamiques qui sous-tendent nos économies

Source : Le Monde

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